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Une jeune femme écoute la radio pendant qu’elle prépare la nourriture dans son petit restaurant au bord de la route à Goma. Photo: Coracon

Coronavirus, les grilles des programmes bouleversées !

La nouvelle épidémie de Coronavirus préoccupe à grande échelle l’humanité entière. Elle s’est subitement improvisée sujet primordial des grilles des programmes des radios locales et thème central de beaucoup d’émissions dans les radios tant internationales, nationales que locales.

Le premier cas de cette maladie est apparu en République démocratique du Congo (RDC) en date du 10 Mars 2020. En province du Nord Kivu le premier cas a été annoncé le 1er Mai 2020. Depuis le début de cette épidémie, la RDC a enregistré 9842 cas confirmés dont 251 décès (données du 23/08/2020).

Ces chiffres sont ceux officiels. En RDC pour le moment, il n’est pas possible  de faire plus de tests par jour comme dans d’autres pays, car les moyens sont très limités. C’est pourquoi il est difficile d’avoir le chiffre exact des personnes qui sont infectées et qui meurent de la Covid-19.

La montée du taux de mortalité

Les sources proches  des cimetières Makao de Goma par exemple, témoignent que le nombre des morts en ville de Goma a sensiblement haussé. ‘’Nous enterrons 50 morts au maximum au courant d’un mois, mais pour le mois de Juillet nous avons enregistré 87 personnes inhumées’’, et la même allure s’observe pour ce mois d’Aout, ont ajouté nos sources.

La lutte contre cette pandémie a constitué une priorité dans presque tous les domaines vitaux.

Les dirigeants politiques congolais sont conscients du danger, vu le taux des morts liés à la Covid-19 en Europe et en Amérique. Ainsi ils ont mis en place plusieurs mesures barrières pour limiter la propagation de cette pandémie. Parmi ces mesures nous citons l’interdiction des rencontres de plus de 20 personnes. Les autorités congolaises ont aussi suspendu des activités dans des écoles, des églises et d’autres pouvant réunir plus de 20 personnes. Ces mesures ont poussé les confessions religieuses, les organisations et structures des rassemblements populaires à négocier massivement des espaces aux radios pour atteindre leurs membres.

Des espaces radio très sollicités

Augustin KINDUVUYIRA, directeur de la Radiotélévision Evangélique et de Développement Hermoni (RTDH), émettant depuis la cité de Kiwanja, en territoire de Rutsuru en province du Nord Kivu affirme : « Les réunions étant interdites, cela a fait de la radio l’espace de liaison entre administrés et administrateurs. Ces derniers utilisent la radio pour passer leurs communiqués, points de presse sur les mesures barrières des COVID-19 et autres décisions. » « Cette situation », indique Monsieur Augustin Kinduvuyira, « nous a poussé à supprimer sept émissions sur la grille de programme en faveur des émissions  sur la Covid-19. »

Au directeur des programmes ad intérim de la radio Sauti ya Injili de Goma, Laurent MWEMA, de renchérir que « la pandémie occupe ce jour environ 80% des émissions sur notre grille ».

Stanley MUHINDO, directeur des programmes de la radio Moto Oicha en territoire de Beni  constate: « On s’est vu obligé de supprimer la retransmission de la RFI de 7h30 pour des raisons du moment. A part ça, il y a aussi des émissions scolaires qui ont été insérées dans notre grille pour accompagner l’éducation des écoliers confinés chez eux ».

A la radio communautaire de Masisi (RACOM), quatre émissions ont été supprimées, affirme Germain MWENYEMALI, directeur de cette radio.

Jérémie KIHAMBU, directeur des programmes de la Radio communautaire Tayna de Goma déclare que plusieurs espaces ont été cédés aux partenaires qui ont financé certaines émissions liées au covid19.

Kennedy WEMA, directeur de la Radio Soleil Butembo affirme : « La radio a juste adapté son programme pour intégrer les programmes sur le Corona. Le programme de la radio est flexible selon le contexte. Il y avait des espaces sur la musique, et on a dû les remplir et aussi rallonger le programme des heures de diffusion parfois ».

Jacques KIKUNI, directeur de la radio Muungano Beni souligne, pour sa part qu’il y a eu d’émissions qui sont tombées pour laisser place à celles qui traitent du  coronavirus. Il regrette cependant que cette crise sanitaire mondiale a fait que certains auditeurs n’écoutent plus des émissions qu’ils aimaient beaucoup, car elles ont été supprimées sur la grille en remplacement de celles qui parlent de la Covid-19.

Qu’en est-il d’autres maladies?

Le Coronavirus est arrivé alors que plusieurs zones du Nord-Kivu font face à d’autres maladies qui déciment la population. Il s’agit par exemple de l’anémie qui a causé 16% des décès soit 879 morts et du paludisme qui a été à la base de 14% de décès soit 750 morts, les maladies cardio-vasculaires avec 526 morts et le SIDA  avec 303 morts pour l’an 2019. Les statistiques de la division provinciale de la santé au Nord-Kivu montrent aussi que 361002 personnes ont été atteint de la diarrhée, 250923 des infections sexuellement transmissibles, 201721 des infections urinaires et 49427 de la carie dentaire.

Hormis l’Ebola dont on a beaucoup parlé, les autres maladies font moins objets d’émissions spéciales dans des radios. Toutefois, même si on n’en parle pas plus, renchérit Kennedy WEMA, directeur de la radio Soleil de Butembo, « ces maladies constituent des réalités dans des centres de santé ici chez-nous. Ce sont des thèmes très capitaux pour les auditeurs mais dont la radio n’arrive pas à produire par manque de moyens pour les recherches».

Jean MALIRO, directeur de la radio Lubero Sud en territoire de Lubero au Nord Kivu, affirme par exemple que le manque de l’expertise les empêche de traiter les émissions de santé dans des radios. Des fois dans les milieux ruraux, on accède difficilement à la connexion internet. Aussi l’accès aux personnes ressources est difficile. « Il nous faut d’appui de certains partenaires pour arriver à surmonter ces difficultés et produire ces émissions », explique MALIRO.

Les radios n’ont pas assez des moyens

Mustapha MULONDA, directeur de la Radio la Voix de l’Université Officielle de Semuliki soulève la problématique de certains experts qui sollicitent les frais de transport et d’encouragement après chaque émission, pourtant la radio n’a pas assez de moyens pour supporter ces frais. « Ce comportement », ajoute-t-il, « ne nous permet pas d’aborder d’autres questions de santé. »

Janvier KUBUYA, chef de la division provinciale de la santé au Nord-Kivu pense que « la population doit savoir que Covid-19 est contagieuse et peut attaquer plusieurs personnes au même moment ». Mais d’autres s’interrogent, pourquoi en faire une priorité pourtant elle ne tue pas beaucoup des gens en RDC. « Oui, nous y mettons aussi trop d’effort car les personnes adultes, surtout celles qui souffrent des maladies chroniques n’y résistent pas. Qui parmi les jeunes peut accepter de rester orphelin parce que ses deux parents sont morts de la Covid-19 » demande KUBUYA. Il explique que d’autres structures sanitaires continuent à fonctionner pour que d’autres maladies soient prises en charge comme d’habitude.

Les radios communautaires au Nord Kivu demeurent un canal important dans l’éducation de la population pour la bonne santé. En RDC le système de santé reste fragile. L’accès aux soins de santé de qualité est aussi un véritable problème pour des milliers de familles en province du Nord-Kivu où des populations vivent dans certaines régions dans la pauvreté à cause de la guerre. Plusieurs structures sanitaires sont aussi abandonnées et d’autres non accessibles suite à l’insécurité qui sévit à l’est du Congo depuis plusieurs décennies.

MUHINDO MAPENZI Pascal, journaliste à la radio Moto Oicha

Gisèle BAGHENI, journaliste à la radio Tayna/Goma