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Samuel MUHINDO se lave soigneusement les mains pour lutter contre Coronavirus. Photo: Coracon.

Coronavirus : Les défis que pose corona  pour les  journalistes Congolais

Les journalistes de Beni au Nord Kivu, en République démocratique du Congo (RDC), font face à une nouvelle épidémie, plus contagieuse que l’épidémie d’Ebola qui vient de faire  2.264 morts depuis août 2018, selon le bulletin du Comité Multisectoriel de la Riposte à la Maladie à Virus Ebola (CMRE) du 8 Mars 2020.

Avec toute leur communauté, les professionnels de médias de la région attendent impatiemment que le gouvernement Congolais déclare la fin de cette dixième épidémie d’Ebola dans le pays qui a plus touché le terroir de Beni. Pendant environ deux ans, les journalistes de cette région ont été à la première ligne, aux côtés des équipes médicales, pour amener la population à combattre Ebola à travers des reportages et émissions visant au changement de comportement.

Maintenant que le COVID-19, une pandémie mondiale due au Coronavirus selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), est là, ça donne plus du travail aux professionnels de médias. Les médias ont à ces jours une fonction sociale très essentielle afin que tout le monde soit sensibilisé contre la propagation de cette pandémie. Ils vont donner la parole aux experts, relayer les décisions des gouvernements sur les mesures de protection, donner les statistiques des cas des contaminations et peut être des cas de décès suite au COVID-19. Ils seront en face des personnes sans savoir qui porte déjà le virus et  qui peut les contaminer.

Les radios s’impliquent dans la prévention du Covid-19

Jackson SIVULYAMWENGE, rédacteur en chef à la radio Moto Oicha, fait part de quelques mesures prises dans leur  conseil de rédaction pour éviter la contamination. La première mesure est de réduire l’équipe de rédaction. « Comme nous sommes au nombre de 10 journalistes, nous avons décidé de scinder l’équipe en deux à raison de cinq personnes par groupe. Ainsi, une équipe travaillera dans un local situé à côté et un autre restera dans la salle de rédaction. Ce nombre réduit par groupe permettra aux journalistes de s’assoir à distance de plus d’un mètre  l’un de l’autre ». Il annonce que la deuxième mesure concerne l’espacement des émissions pour limiter la propagation du virus d’un animateur à un autre. « Comme on a un seul studio, nous avons aussi espacer les émissions diffusées en direct pour éviter que la première personne qui anime son émission ne contamine celle qui viendra après. Ainsi, la deuxième émission peut intervenir 10 ou 15 minutes après et cela après avoir désinfecté le studio ».

Les journalistes restent, cependant, exposés à la maladie par ce que, sur le terrain ils réalisent des interviews sans respecter la distanciation. Et ce, en raison de leurs matériels qui ne sont pas adaptés. Monsieur Dimanche KAMATHE, rédacteur en chef à la radio Muungano Oicha estime que c’est durant cette période exceptionnelle de la pandémie à coronavirus que chaque journaliste devrait avoir son propre enregistreur fixé au trépied ou bâton afin de rester distant à au moins un mètre de son interlocuteur. Pourtant poursuit-il, c’est le contraire dans plusieurs radios ici. On peut avoir deux enregistreurs pour six journalistes ! « En tout cas le risque de contamination dans les rédactions est très élevé. On veut bien se protéger, mais il n’y a pas des moyens dans nos radios rurales », s’inquiète monsieur Dimanche KAMATHE.

L’inquiétude des responsables de radios

La crainte de nombreux responsables des radios locales c’est que leurs radios  n’ont toujours pas de moyens pour payer, en elles seules, ce dont elles ont besoin pour se protéger. « Ça demande que nous ayons de masques, des kits de désinfectants, de lavage des  mains, des dictaphones avec trépieds. Mais qui va le faire, nos radios sont tellement pauvres qu’elles ne peuvent pas trouver assez de moyens financiers pour s’acheter ces matériels, tout est bloqué !», s’exclame monsieur Esdras NDUNGO, directeur de la radio Evangélique émettant de Oicha chef-lieu du territoire de Beni au Nord kivu.

Il faut noter  que les turbulences du COVID-19 vont affecter la vie de chacun et, pour beaucoup, leur capacité à travailler et à générer des revenus.

La situation en famille

Déjà, les conséquences économiques se font sentir. Les prix des aliments ont sensiblement augmenté sur le marché. Nombreux journalistes ici, en plus du journalisme, cultivaient les champs au tour de Oicha, mais ils n’y accèdent plus suite à l’insécurité. C’est le cas du journaliste Amos MUKANGASA qui à ces jours est responsable d’un ménage où vivent 9 personnes. Il doit les nourrir mais déjà il sent du poids sur ses épaules. « Avant on prenait trois repas par jour mais maintenant on vient de les réduire à deux. On va voir comment ça va évoluer. Je crains qu’on arrive à un repas par jour ! Ça sera un désastre », s’inquiète-t-il.

C’est dans ce contexte qu’il se dit être maintenant partagé entre rester chez lui pour la suivie de sa famille et venir à la radio pour son travail afin de sauver toute la communauté.

Certainement que le COVID-19 aura un impact significatif sur les journalistes du monde entier. Ça risque d’être  pire pour les journalistes des pays pauvres. Certes aussi que l’accès aux sources d’informations sera une difficulté en cette période du COVID-19.

Notons que dans cette zone de Beni, les Journalistes  travaillent déjà dans les conditions difficiles dues à l’insécurité qu’on attribue aux groupes armés locaux et étrangers dont l’ADF, d’origine Ougandaise. Depuis 2014, des attaques orientées vers les civils ont déjà  provoqué la mort de plus de 3000 personnes. C’est dans ce contexte que les journalistes de Beni  travaillent. Et leurs radios n’ont toujours pas de moyens pour leur donner un salaire, moins encore pour les doter d’un équipement et matériels de travail adéquats, adaptés aux réalités du terrain.

Muhindo Mapenzi Pascal, journaliste à la Radio Moto Oicha