Financer le journalisme indépendant

Réfléchir sur une stratégie intelligente pour financer un journalisme fiable. Photo : KAS

« Gagner de l’argent avec la radiodiffusion, c’est possible ». Ce postulat a été au centre des échanges à Kinshasa, entre des journalistes, des gestionnaires des radios et des experts du domaine du journalisme et de la communication.

Le cadre offert par Konrad Adenauer Stiftung (KAS, Fondation Konrad Adenauer) aura été, durant deux jours pleins, un espace de réflexion, de débats pour repenser les pratiques courantes du journalisme radio en République démocratique du Congo (RDC). De l’époque coloniale à aujourd’hui, la radio a joué divers rôles portant des cachets dictés par le contexte du moment ainsi que des rôles pervers pour ne pas dire inattendus.

Depuis que la RDC a choisi la démocratie comme régime politique, l’espace médiatique congolais a connu des métamorphoses. A côté de la radio publique, on a vu apparaître des radios privées commerciales ainsi que des radios associatives et communautaires. Le souci actuellement c’est de savoir comment ces radios arrivent à se doter des moyens autonomes de fonctionnement pour soutenir leur indépendance éditoriale. Le tableau est malheureusement sombre : Dans la plupart des cas, les journalistes qui travaillent pour ces médias ne reçoivent pas de rémunération suffisante et dans le cas pire, ils sont simplement des bénévoles. Une situation qui les contraint à mendier des sous auprès des sources d’information.

Il faut payer les salaires

A ce sujet, Christophe Plate, directeur de KAS Media Africa et intervenant dans la conférence, martèle : « Pour jouer un véritable rôle de quatrième pouvoir, les radios doivent payer le salaire à leurs journalistes ». A Pierre N’Sana, doctorant en communication à l’Université Libre de Bruxelles et intervenant dans les assises, d’ajouter en citant le professeur congolais Jean-Chrétien EKAMBO (inédit), « Organiser des rencontres entre l’urgent et les gens pour avoir l’argent » avec la radiodiffusion.

Pour N’Sana, l’urgent n’est rien d’autre que l’information qui se veut de bonne qualité pour être mieux consommée. C’est par extension l’ensemble de tous les programmes que l’administration de la radio décide de livrer aux auditeurs. Les gens sont les consommateurs des informations. Il est utile de comprendre leurs attentes, leurs besoins, leurs préférences de tisser avec eux des liens, les intéresser, les attirer et les fidéliser. Quant à l’argent, c’est le profit à tirer de la démarche qui harmonise le public et le contenu de la radio. Il est ici question de rentabiliser l’audience, l’image, les compétences et les services ainsi que diversifier les sources de revenu (rentabiliser la confiance).

Gagner les marchés publicitaires

En pratique, la radio qui offre un bon programme à ses auditeurs se donne la chance de gagner plus de marchés publicitaires. Pour d’autres milieux, tels les zones rurales où la publicité ne tient pas du tout, la démarche exige plus d’imagination de la part des gestionnaires de radios. Le cas des activités génératrices de revenus est évoqué. Quand les recettes sont au rendez-vous, la radio se donne l’autonomie financière pour soutenir des informations indépendantes.

Dans la même réflexion, l’intervenant, Jean-Luc Mootoosamy, directeur de Média Expertise, une agence suisse d’appui technique aux médias, recommande l’intégration du mariage entre les réseaux sociaux et la radio afin de tirer profit de la complémentarité que se donnent les deux canaux de communication.

KAKULE VAGHENI Jacques